Comment recruter aujourd’hui ?
Quel que soit le secteur, quelle entreprise aujourd’hui n’est pas confrontée à des problématiques de recrutement ? Quelle attitude adopter face à des demandeurs d’emploi dont les priorités ont bien changé ? …
Laurent Durant a un regard particulier sur le marché du travail en esthétique car il est à la fois au sein de l’École Catherine Sertin, en contact avec des élèves mais aussi des entreprises. Il est confronté à la fois à : «Je cherche du travail» et «Je cherche une employée».
LES NOUVELLES EXIGENCES DES CANDIDATS
L’École Catherine Sertin compte 250 élèves et pourtant les entreprises demandent toujours plus de salariées. La problématique de recrutement ne vient pas de la part des élèves. Aujourd’hui, les élèves motivées trouvent facilement du travail, et donc, automatiquement, elles ne restent pas, c’est une génération zapping.
Cette jeunesse est par ailleurs ultra informée avec une recherche de confort permanent qui passe par la valorisation de la vie privée, peu de mobilité géographique et avec, malgré tout, un salaire conséquent même si ce n’est pas la priorité. Voilà la problématique de départ.
Cette nouvelle génération est avant tout à la recherche de :
– confort,
– valorisation de la vie privée, cela se traduit par avoir son mercredi pour s’occuper de ses enfants… D’autres refusent de travailler le samedi ou veulent travailler tout près de chez elles…
Le salaire vient pratiquement en dernière position dans les exigences. Dans une récente étude, 91 % des personnes interrogées affirmaient que le salaire n’était pas le plus important, au contraire de la notion d’appartenance en entreprise, c’est-à-dire aller travailler en se sentant respectée, fière d’appartenir à une enseigne.
Vous n’avez pas le choix : vous devez vous adapter à ces contraintes et pour cela mettre en place une procédure de fidélisation des salariés.
La multiplication des métiers
La multiplication des business model offre un nombre considérable de postes aux esthéticiennes.
Aujourd’hui, si l’entreprise n’est pas satisfaite de son employée et lui fait une réflexion qui n’est pas appréciée, alors l’employée partira d’elle-même dès le lendemain.
Avec beaucoup de naturel, la candidate vous explique qu’elle aimerait travailler un an pour Yves Rocher, puis partir pour un spa urbain, avant d’intégrer le spa de l’hôtel quatre étoiles près de chez elle.
Ce discours courant aujourd’hui était inimaginable il y a dix ans.
Le nouveau management de bienveillance
Selon Laurent Durant : «Il faut peut-être laisser la clientèle un petit peu de côté et travailler un peu plus sur l’équipe en valorisant les compétences de chacune, en les formant mieux, en leur donnant un sentiment d’appartenance.
Aujourd’hui, les salariées ont besoin d’être préservées de toute blessure d’orgueil pour laisser la place à la sécurité, au confort, à l’amour et à la richesse». Vous ne pouvez pas arriver le matin en annonçant que la marque a changé ou que vous avez recruté une nouvelle esthéticienne sans en avoir parlé avant à l’équipe.
Faites participer votre équipe sur les grandes questions de l’institut, faites tourner vos salariées sur plusieurs prestations de l’entreprise, ça c’est de la fidélisation de salariées.
La blessure d’orgueil
Vous gérez un institut, une cliente vient vous voir pour se plaindre de la piètre qualité du massage californien qu’elle a reçu. Vous faites venir l’esthéticienne et vous lui dites qu’elle a fait un mauvais massage, qu’elle n’a pas été professionnelle. C’est ça, une blessure d’orgueil et c’est difficile à rattraper.
Si la cliente n’est pas satisfaite, il faut interroger l’esthéticienne sur la formation qu’elle a reçue, son niveau de compétence était-il adapté ? La cliente n’est pas contente mais est-ce qu’elle ne cherchait pas simplement à obtenir un soin en cadeau… ?
Faisons un parallèle avec le sport. Après un match, on ne dit jamais au joueur qu’il a été nul mais qu’il a mal fonctionné sur ce point précis et on revoit tout en vidéo pour que, la prochaine fois, ça ne se reproduise pas.
La blessure d’orgueil consiste à mépriser les états d’âme de son équipe, cela crée un fort sentiment d’insécurité.
Moins vous ferez de blessures d’orgueil et plus vos salariées seront en synergie avec vous et le reste de l’équipe.
Le sentiment d’appartenance
Il est sans doute facile d’être fier de travailler pour une grande marque de luxe. Pour apporter de la fierté lorsque l’on est un petit institut de village, cela passe par la délégation des pouvoirs, la confiance, c’est de la bienveillance et souvent, les petites entreprises ont du mal à faire confiance.
N’allez pas croire que le fait de travailler au sein d’une entreprise prestigieuse rend tout plus facile, n’oubliez pas la compatibilité d’humeur et la qualité du management. Les problèmes sont partout quelle que soit l’image de l’entreprise.
L’entretien annuel
L’entretien annuel est obligatoire tous les deux ans, il faut le faire tous les ans, et malheureusement, il n’est pratiquement jamais fait. La raison invoquée est le manque de temps. Mais cela vous permettrait d’avoir une vision très nette de ce que souhaite votre esthéticienne, c’est essentiel !
Cela vous permet de travailler sur des axes de progression, des formations… De voir comment votre salariée a évolué de N-1 à aujourd’hui et ses souhaits pour demain.
Par exemple, si vous proposez à votre salariée de devenir la première esthéticienne de l’institut, elle ne sera pas responsable mais aura des missions en plus à faire. Est-ce
que cela pourrait l’intéresser ? Voilà en quoi consiste un entretien d’évaluation, il doit être clair et précis pour tout le monde. Il faut vous adapter à vos salariées et créer des procédures de bienveillance.
Le recruteur aujourd’hui
Soit vous savez vous adapter avec un recrutement en cohérence avec les exigences de la future salariée, à savoir que la candidate ne sera là que pour un ou deux ans, après, il faudra trouver quelqu’un d’autre. Travaillez step by step, ne lui offrez pas toutes les formations immédiatement. Essayez de la fidéliser au fur et à mesure.
LA LECTURE DU CV EN 2019
La multiplication des expériences
Si avant, il n’était pas bien vu d’avoir trop d’expériences courtes sur son CV, tout a changé. Travailler quelques mois dans un institut n’a plus rien d’exceptionnel : «J’avais fait le tour de cet institut, j’avais envie d’autre chose, je voulais découvrir d’autres soins», voilà la réponse à une succession de courtes expériences. Cela est fait et dit avec beaucoup de naturel, d’innocence, de naïveté, c’est symptomatique de cette génération de 15 à 35 ans.
Aujourd’hui, les chercheuses d’emploi ne sont pas prêtes à tout, quitte à prendre des risques et se retrouver dans une sorte de fragilité, de revenir à une situation précaire.
Si l’ambiance, le produit, le salaire, la notion d’appartenance ne leur conviennent pas, peu importe, elles zappent pour aller dans un autre entreprise.
Le «trou» dans le CV
À la lecture du CV, vous découvrez que la candidate a pris une année sabbatique pour voyager. Si avant «un trou dans le CV» était très mal vu et laissait imaginer que l’on avait perdu ses compétences, aujourd’hui, ça doit être bien vu, comme un signe de curiosité, d’ouverture au monde.
Les centres d’intérêt
Grâce à la fiche de poste, vous déterminez si professionnellement, la personne correspond au poste, maintenant, il faut découvrir l’aspect humain et c’est le plus important.
En tant que recruteur, on ne s’intéresse pas assez aux centres d’intérêts, les dernières lignes, tout en bas du CV.
Elles sont essentielles car ce sont elles qui vous révèlent la personnalité de la candidate.
Exemple
– Vous avez fait du sport ?
– Oui, du tennis.
– Qu’est-ce que vous avez fait en tennis ?
– J’ai joué pendant dix ans.
– Vous avez fait de la compétition ?
– Oui, j’ai été longtemps classée, j’ai gagné des tournois.
– Vous étiez en équipe ?
– Oh oui, j’étais dans l’équipe de ma ville du 78, c’était très sympa !
– Et dans l’équipe vous faisiez quoi ?
– J’étais capitaine.
Nous étions à la recherche d’un aspect leadership dans cette personnalité, nous l’avons trouvé.
Vous n’allez pas tout savoir, loin de là, il y a toujours des surprises, limitées en période d’essai, souvent plus nombreuses et généralement négatives après. Il y a malheureusement
des personnes qui ne veulent travailler que trois mois pour après retourner au chômage, cela arrive dans toutes les sociétés grosses ou petites et on ne peut pas y faire grand-chose.